Banquet de la rentrée scolaire du 1er septembre 2018

Caudron ne la remercia même pas  pour son verre de jus, et se carapata immédiatement. Georgiana la suivit du regard en haussant les sourcils. Emrys était une idiote pour refuser ainsi la main de l'amitié qu'elle lui avait tendue. Tout le monde savait qu'il valait mieux être dans ses petits papiers, et si la nouvelle ne le savait pas encore, elle ne tarderait pas à l'apprendre. Tant pis pour elle. Georgie détourna résolument le regard de Caudron. Qu'elle reste sur son bout de banc. Et que Sax garde ses commentaires pour lui. Elle lui adressa un regard furieux, un peu vexée d'avoir vu sa tentative d'intégration aussi foirée par la seule faute de la petite idiote elle-même, et plongea le nez dans son propre verre de citrouille-whiskey. Un léger voile rouge lui montait aux joues et elle expira, cherchant à se détendre. Elle avait presque oublié à quel point les subtilités sociales demandaient de l'énergie, durant l'été.

Fort heureusement, Danvers revenait enfin à la vie, faisant une excellente diversion. Gigi luijeta un regard dégoûté. La Poufsouffle se comportait comme une chatte en chaleur, étalant ses envies à la vue de tous avec une vulgarité extrême. Elle-même n'était pourtant pas une sainte nitouche, mais elle était dans le contrôle. Les garçons la voulaient. Ce que Gigi voulait elle-même était beaucoup moins explicite, et si elle était loin de se cacher d'être sexuellement (très) active, elle ne l'était pas en public.

Georgie pouffa légèrement devant la répartie d'Aryel. Il allait se faire des ennuis, mais c'était extrêmement amusant, et elle lui rendit son clin d'œil. Elle avait au moins sa fierté pour elle de savoir qu'il ne la passerait jamais comme un rogaton à un ami. Pas elle. C'était vrai que l'été avait été long… il faudrait qu'ils renouent avec la joie de la salle de bain des préfets. Son sourire s'allongea, félin, et elle s'étira légèrement sur sa chaise.  "Quand tu auras fini avec les Danvers de la Terre…" Nouveau clin d'œil, un peu plus discret.  D'ici à ce qu'il sorte de retenue demain soir, elle aurait chopé le mot de passe convoité. C'était réglé comme du papier à musique.

Elle termina son verre, définitivement relâchée sur son banc, quoi que toujours avenante. En contrôle, mais avec un plaisant buzz aux oreilles, assez, en tout cas pour noyer un peu à côté d'elle ce charmeur de serpents de Sax aux prises avec sa dernière victime. Elle le regarda nourrir Gabriella, et cela lui coupa momentanément l'appétit. Tant pis, elle n'épongerait pas ce soir. Ce garçon avait le don de la dégoûter pour au moins deux semaines des pommes de terre. Elle battit des cils, comme pour chasser de mauvais souvenirs, avant d'envoyer un regard courroucé à Danvers (c'était plus facile, et moins dangereux, d'être en colère contre elle que contre Sebastian).

"En tout cas, je te déconseille vivement de prendre mon apparence un jour, Danvers." Sans don vélanique, de toute manière, le résultat ne serait probablement pas très réussi. Elle eut un sourire plein de menaces et se resservit en jus de citrouille, sans whiskey cette fois-ci. Elle n'avait pas sitôt posé la carafe que le gobelet se renversa devant elle. Avait-elle consommé un peu trop de whiskey ? Légèrement troublée, elle sortit sa baguette de sa poche pour nettoyer le bordel. Tant pis, il n'y aurait pas d'hydratation pour elle non plus.

Gabrielle était bien bête aussi, de se faire ouvertement un ennemi comme Sebastian. Gigi se mordilla la lèvre, geste mi-sensuel, mi-angoissé. "Dégueulasse." Au moins, avec ce genre de manières, elle était certaine que la Pouffy ne lui ferait jamais d'ombre. Comme si quelqu'un sain d'esprit aurait jamais pu comparer leurs cheveux...

Mauvaise décision. Très mauvaise décision. Sax s'était pris la purée en pleine gueule et ferma brusquement les yeux. Immobile. Quelques hoquets de stupeurs autour de lui. Un silence suspendu. Ses camarades de Serpentard savaient ce que pouvait signifier ce genre de provocation. Et ils savaient que la dernière chose à faire avec lui était de l'humilier publiquement et de manière aussi éhontée. D'un mouvement lent et précieux, Sax récupéra un morceau de serviette pour s'essuyer le visage. Gabriella était une clodo qui crachait sa bouffe aux visages des garçons après avoir joué les actrices de cul devant toute la maison des Verts&Argents et en plein banquet de la rentrée. Gabriella était stupide et venait de signer son arrêt de mort. Avec un geste de la main courtois, il refusa poliment l'offre de l'un de ses camarades pour lui lancer un sort de nettoyage. Il sourit. La respiration calme. Les épaules tendues, néanmoins.

Gabriella avait parlé dans le vent. Il n'avait pas écouté ses jérémiades de petites traînée. Il ne l'avait pas lâché non plus. Lui cramponnant l'épaule en enfonçant ses doigts dans le tissu. Sax faisait bonne mine malgré tout. Et après avoir nettoyé son visage avec une méticulosité sereine, il tourna lentement la tête vers elle. Garda son sourire.

Une débile qui crachait sur le visage de son préfet en chef. La remarque de Georgiana lui passa par-dessus la tête. Si ça lui faisait plaisir de penser qu'elle l'attirait... Georgiana s'inventait souvent une vie de diva désirée et désirable quand tout le monde parlait secrètement du diamètre de son trou du cul.

« Vous valez pas mieux l'un que l'autre... »

Sax ricana, la tête baissée. Regarda Aryel et échangea avec lui un sourire qui laissa apparaître une lueur folle dans ses yeux.

Brutalement, il chopa Gabriella par le col et la repoussa en arrière du banc pour la suspendre dans le vide et l'empêcher de bouger. S'il la lâchait, elle tombait par terre. Si le Serpentard semblait parler calmement, quelque chose tremblait dans sa voix. Une rage contenue.

« D'habitude, les gens que je lâche chutent de plus haut que ça... » Souvenirs... Il feinta de la lâcher pour la rattraper avant qu'elle ne s'éclate le crâne sur le sol. Il se pencha sur elle. Les lèvres contre elle à en goûter la fraîcheur de son oreille. Il inspira profondément son parfum de petite garce, dans ses cheveux, tête contre tête. Son souffle venait contre la nuque de la jeune fille. « J'espère que tu es bien accompagnée, bichette... A la moindre imprudence, je ne te raterai pas. » Murmura-t-il au creux de son oreille. La voix toujours d'un calme infernal. Emprunte d'une menace de plomb. La voilà prévenue. Si de nombreux de ses camarades le craignaient, c'étaient pour d'excellentes raison. « Et maintenant... »

Il se redressa et n'attendit pas son reste. Il sortit du banc, une jambe à la fois sans la lâcher, pour la traîner hors de la table des Serpentard et la bousculer vers celle des Poufsouffle.

« Sors de là ! » Le ton de sa voix avait reprit une teinte moqueuse mais sévère et stricte. Il parlait au nom de la préfecture de Havalbion. Sax s'adressait de manière claire et forte à elle, de sorte à ce que tout le monde puisse en profiter. « Tu n'as rien à faire à cette table. » Il s'adressa aux élèves Jaunes&Ebènes. « Et surveillez votre préfète, s'il vous plait ou je retire dix points à Poufsouffle avant même de commencer l'année. » Il fit mine de s'essuyer encore la joue. « Cracher sur un élève, c'est inadmissible. Cracher sur un préfet-en-chef, c'est stupide ! Et dites-lui que si elle ne veut pas flirter avec les Serpentard, qu'elle ne vienne pas à leur table pour leur faire des propositions ! »

Les professeurs avaient entendus ce qu'il avait à dire. Les Poufsouffle avaient entendus ce qu'il avait à dire. Les Serpentard avait entendu ce qu'il avait à dire. La réputation de Gabriella était ruinée. Le professeur de botanique savait. Le directeur l'avait repéré. Gabriella la sale tchoin qui crachait sur les gens comme un vieux lama. Gabriella la grosse répugnante. Gabriella qui ne respectait même pas son directeur en prenant soin de prendre son apparence devant lui. Qui ne respectait même pas sa propre maison. Mauvaise élève. Mauvaise Poufsouffle. Mauvaise préfète. Mauvaise fille.

Et Sax n'en avait pas fini avec elle. Il échangea un regard avec la sorcière. Eut un imperceptible sourire. Pas maintenant. Pas devant les gens. On aura tout le temps d'en rediscuter en privé, mon chou.

Tranquillement, comme s'il ne s'était rien passé, Sax reprit sa place et acheva d'essuyer les dernières traces du geste répugnant de sa camarade. L'air de rien.

« J'ai plus rien ? » Demanda-t-il en levant le menton et en arquant un sourcil. Toute tension brutalement redescendue.